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jeudi 9 avril 2020
Sermon du Triduum
La neuvaine de la Miséricorde commence le vendredi saint.
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JEUDI SAINT
Chers paroissiens
Shalom ! Que la paix habite vos cœurs et dans vos foyers !
Je vais faire les choses un peu différemment cette semaine, en cette Semaine Sainte, en ce qui concerne mon « message », mes « mots d’encouragement » et mon « homélie ». Le fait est qu’en raison de la situation dans laquelle nous nous trouvons avec ce » confinement » bienveillant (quarantaine / isolement), tout est » différent « . C’est drôle, parce que je passais en revue les sermons passés pour voir si certains d’entre eux m’avaient inspiré de manière importante dans le but d’en tirer des idées et les inclure (je ne vais pas le faire après tout). J’ai lu dans une des réflexions quelque chose comme « …chaque année nous lisons les mêmes Écritures et nous faisons les mêmes démarches etc… ». Eh bien, cette année, ce ne sera pas le cas. Les lectures de l’Écriture, oui, bien sûr, mais nous ne ferons rien « de la même manière » cette année. Alors, commençons par cela.
J’ai déjà entendu des commentaires (ou je les ai lus dans des courriels) exprimant plus ou moins la tristesse que les choses soient si » cachées » cette année en ce qui concerne nos services de la Semaine Sainte et qu’il soit triste que nous ne puissions pas remplir les églises et faire ce que nous faisons habituellement le dimanche de Pâques. Certaines personnes ont même exprimé leur tristesse et leur inquiétude pour moi personnellement et ont dit qu’elles « …se sentent tellement tristes… » parce que je serai seul à Pâques, à célébrer dans une église vide. Il serait ridicule de prétendre que ce ne sera pas triste. Bien sûr que ce sera triste. Mais il y a un cadeau qui nous est offert au sein de cette réalité.
Tout d’abord, et c’est très important… la célébration de la Semaine Sainte et de Pâques ne concerne pas seulement le « prêtre ». Je suis triste de ne pas être avec vous tous à Pâques, c’est sûr. Extrêmement triste en fait… Je ne mentirai pas. Je ne suis qu’un être humain après tout. Mais, il ne s’agit pas que de moi ! Et combien de fois j’ai essayé de transmettre ce sentiment d’une autre manière dans mes réflexions ! Il ne s’agit pas de savoir « qui » porte les vêtements, etc. mais de savoir ‘’qui’’ ces vêtements représentent : Le Christ Jésus et son sacerdoce ! Vous savez, et je suis sûr d’avoir déjà partagé cela auparavant, il existe une tradition parmi les chrétiens orientaux, généralement les orthodoxes russes… ils ont ce qu’ils appellent des « vêtements à dos haut ». On peut à peine voir le prêtre dans cette chasuble qui est ornée et renforcée de sorte que le col remonte et tourne presque au cou du prêtre. (On dirait presque une tente) Lorsque nous demandons pourquoi, la réponse est : « …c’est pour souligner que c’est le Grand Prêtre-Jésus-Christ et non « le prêtre humain » qui porte ces vêtements. Autant j’aime porter les vêtements que nous portons en Occident, autant je suis inspiré par ce sentiment qui indique un fait : « Lui Seul est Saint, Lui Seul est Seigneur, Jésus-Christ… » Le « sacerdoce » lui appartient, à lui, Jésus le Christ ! Commençons donc notre voyage vers ce lieu, c’est-à-dire avec le Jeudi Saint, qui marque le début de la Passion, de la mort et de la résurrection du Christ.
Une fois de plus, rappelons-nous que la « Dernière Cène » n’était pas une affaire facile. Je pensais l’autre jour que même l’événement du lavement des pieds, qui est devenu un rituel, aurait été une réalité que nous n’aurions pas pu comprendre, à cause de la différence culturelle. Le thème central de cet événement, le lavement des pieds, avait pour but de souligner le fait que Jésus assumait le rôle de « serviteur » alors qu’il était considéré comme le « Maître ». Nous n’avons aucune idée de la confusion qu’il y avait chez les disciples de Jésus à le voir se rabaisser ainsi (dans leur perception bien sûr) ! Cela les a scandalisés sans doute, et il serait tout à fait normal qu’ils se sentent ainsi, compte tenu de la culture dans laquelle ils se trouvaient. Pourtant, Jésus leur avait enseigné depuis le début : « …celui qui veut être grand parmi vous doit être votre serviteur… » MT 20:26
Puis, finalement, Jésus partage avec ses apôtres ce qui deviendra par la suite l' »Eucharistie » et, en même temps, Jésus institue le sacerdoce – SON Sacerdoce. Dans un sens, on pourrait dire que ce rôle de « serviteur » continue mais maintenant, le Serviteur souffrant non seulement « sert » (diakonia ) mais se donne Lui-même comme nourriture – une nourriture céleste ! Imaginez maintenant, si nous pensons qu’il était difficile pour les apôtres de comprendre le lavement des pieds, combien plus leur serait-il difficile de comprendre ÇA ? Et arrêtons-nous un instant, s’ils comprenaient, surtout la réalité de l’Eucharistie, alors cela serait problématique, et c’est tout aussi vrai aujourd’hui ! Il ne s’agit pas de « comprendre » ! Dès que nous nous libérons de la nécessité de « comprendre » les actions de Dieu dans ce Très Saint Sacrement, c’est alors que nous pouvons commencer à entrer dans ce que nous appelons « les Mystères Sacrés » ! Restons-en là. Réjouissons-nous de ce « mystère » de l’Amour radical de Dieu exprimé dans la nouvelle Pâque, le Nouvel Exode.
Concluons cette partie de la réflexion en réalisant qu’au sein de cet événement, qui est la dernière Cène, tout le « mystère » pascal est en quelque sorte révélé et célébré par ce repas sacré qui se poursuit encore aujourd’hui et, d’une manière que Dieu seul connaît, le temps s’arrête. En fait, le temps n’existe pas – car Dieu n’est pas limité par le temps ou l’espace. Ce fait devrait nous réconforter dans cette période d’incertitude. Il devrait nous apporter l’espoir. Pas seulement par rapport au fait que nous marchons déjà avec le Sauveur ressuscité, mais par rapport au fait que « Dieu n’est pas limité… par le temps ou l’espace ». Où que vous soyez en ce moment même, DIEU EST !


VENDREDI SAINT
Nous serions surpris d’apprendre que dans les premiers siècles du Christianisme, il n’y avait pas de séparation claire entre la commémoration des événements du Vendredi Saint, c’est-à-dire la Passion du Christ, et la célébration de la Résurrection. Ce n’est qu’au IVe siècle que s’est développée dans la liturgie de l’Église une célébration cohérente qui mettait l’accent sur les événements dans une sorte d’ordre chronologique. Nous devons également nous rappeler que dans l’Église primitive, il n’existait pas un livre solitaire appelé « Bible » comme nous l’avons aujourd’hui, mais une tradition orale selon laquelle ces événements que nous appelons aujourd’hui Semaine Sainte (Triduum) étaient partagés dans le cadre de rassemblements, avec la fraction du pain. Je mentionne cela ici parce qu’il y a quelque chose d’essentiel pour nous dans notre cheminement avec le Christ, qui EST avec nous maintenant, à découvrir et à contempler et même à permettre que cela nous donne de la force, surtout en ce moment.
Une fois de plus, nous nous sentons un peu désorientés parce que nous ne pouvons pas nous réunir et suivre les rituels de l’Église le Vendredi Saint et, en fait, toute la Semaine Sainte. Pourtant, dans l’Église primitive, c’était aussi une expérience différente. Il convient également de noter que les premiers chrétiens devaient souvent se « cacher » et qu’ils n’étaient pas « libres » de célébrer ouvertement parce qu’ils étaient persécutés.
Voyons maintenant ce qui est chanté dans la liturgie orientale à Pâques (le Tropaire de Pâques) : « Le Christ est ressuscité des morts, par Sa mort Il a vaincu la mort ; à ceux qui sont dans les tombeaux, Il a donné la vie. ». Je voudrais citer le père John Behr, tiré d’une de ses réflexions données à Yale : « La joie de la résurrection est donc la joie de l’affirmation que celui qui est sur la croix est bien le Seigneur, piétinant la mort par sa mort. Et, à son tour, la célébration de la résurrection du Christ n’est pas un retour bienvenu à la vie de celui que nous pensions perdu, comme nous pourrions célébrer le retour de celui qui a été « sauvé de la mort » par une intervention médicale… c’est plutôt l’ouverture d’une autre forme de vie… la vie qui est la vie de Dieu lui-même ».
« La vie de Dieu Lui-même » ! Vous savez, il faut le dire, c’était Dieu qui était sur cette croix ! (Jésus Christ : vrai Dieu et vrai homme) C’est Dieu qui est « venu à nous »… même dans cette réalité d’horreur absolue et de mort ! C’est Dieu qui a poursuivi ce qui avait été commencé lorsqu’il nous a créés de la poussière de la terre et « a soufflé en nous sa vie » ! C’est Dieu, « Emmanuel » – « Dieu avec nous » qui est notre vie en ce moment même.
Le Vendredi Saint n’est pas une commémoration de la défaite, de la perte. La croix, à bien des égards, est le sommet de toute l’histoire humaine : tout culmine dans cet événement et tout recommence…à partir de ce moment. « Tout est accompli »!

PÂQUES
Selon l’évangile de Saint Jean, le jour de la résurrection Marie Madeleine serait allée au tombeau de Jésus très tôt le matin. En découvrant que le corps de Jésus n’était plus là, elle se serait mise à pleurer. Deux anges, assis dans la tombe, lui auraient demandé « Femme, pourquoi pleures-tu? » Elle répond, « On a enlevé mon Seigneur et je ne sais pas où on l’a mis. ». Tout en parlant, elle voit Jésus et il répète ce que les anges avaient dit, « Femme, pourquoi pleures-tu?” Mais Jésus ajoute aussi « qui cherches-tu? »
Ça semble une drôle de question que Jésus pose. Il sait sûrement qui Marie cherche et pourquoi elle pleure. Pourtant, Jésus tient à lui poser ces questions très simplement. « Pourquoi pleures-tu? Qui cherches-tu? »
Jésus voulait peut-être que Marie-Madeleine cherche dans son cœur, et même qu’elle se pose la question « Qui ou qu’est-ce que je cherche? Est-ce que je croyais Jésus quand il disait, avant d’être crucifié, qu’il ressusciterait de la mort le troisième jour? Est-ce que je croyais qu’il parlait en paraboles, et qu’il ne voulait pas dire qu’il ressusciterait littéralement de la mort? »
Lorsque Marie Madeleine retourne aux apôtres pour leur dire que Jésus était vraiment ressuscité des morts, les apôtres croyaient qu’elle avait perdu la tête. Depuis trois ans Jésus leur disait qu’il allait souffrir, qu’il allait être mis à mort et qu’il allait ensuite ressusciter le troisième jour. Évidemment les apôtres ne comprenaient pas. Soit ça, ou ils ne croyaient pas ce que Jésus leur avait dit. Après tout, les apôtres étaient encore en état de choc après la mort brutale de Jésus et ils voyaient encore l’horreur du Golgotha. Paralysés de crainte et de tristesse, ils voulaient simplement pleurer la mort de Jésus et reprendre leur vie.
Éventuellement, Jésus allait devoir apparaître parmi eux pour qu’ils commencent même à croire.
Dans certains sens, peut-être que la même question s’adresse à nous qui célèbre la résurrection de Notre Seigneur aujourd’hui : « Qui et qu’est-ce que je cherche? »
Celle-ci est une question avec laquelle nous sommes tous aux prises! Il n’y a absolument aucune façon de s’en sortir. Chacun de nous doit chercher au fond de son propre cœur et se poser la question… « En vérité …qui et qu’est-ce que je cherche? »
Mais il y a un autre message de Jésus qui est aussi important et que nous devons conserver précieusement, même pendant que nous tentons de répondre à la question de « qui et quoi nous cherchons ». Le Christ nous assure… « Moi je suis avec vous…. jusqu’à la fin des temps.

CONCLUSION
Chers amis en Christ, restons donc concentrés sur ces paroles, mais PAS seulement comme de simples paroles d’inspiration. Si tout ce que j’accomplis ici est d' »inspirer » brièvement, alors j’ai échoué. J’espère que je nous inspire tous, y compris moi-même, à ne pas chercher seulement des mots réconfortants, mais à chercher vraiment à être conscients de la présence même de Celui que nous appelons « l’Emmanuel-Dieu avec nous » et à essayer sérieusement d’entrer en communion, en présence du Dieu Saint, non pas par des mots ou même des images, mais par le doux silence, qui est le langage de Dieu.
Au début de ce parcours éprouvant, j’ai écrit ceci, et c’est avec ça que je souhaite conclure :
Je ne vais pas mentir, la « routine » va me manquer, pour ainsi dire. Mais nous n’avons pas le choix. Nous devons entrer dans cette sorte d' »expérience du désert ». Nous nous en sortirons. Vous verrez. Et nous aurons très probablement une véritable célébration de la Pentecôte ! Mais quoi qu’il en soit, le Christ est ressuscité MAINTENANT ! DIEU EST… MAINTENANT !
Enfin, vous êtes toujours dans mes prières. Je vais célébrer la messe pour les deux paroisses en privé (seul) et vous serez avec moi pendant ces célébrations ! Vous pouvez en être sûrs !
Que Dieu vous bénisse tous et, comme un vieux prêtre ukrainien, je savais qu’il dirait (avec un fort accent) sur son répondeur avant le « bip »… « Souriez, Dieu vous aime et moi aussi ! »
Père Bob